Gestion d’entreprise agricole à McGill : une tradition familiale

Le programme de niveau collégial a formé des centaines de producteurs agricoles au fil des décennies.
Nathalie Maheu récolte les raisins des vignes du campus Macdonald pour en faire du vin. / Photo : Caitlin MacDougall
Nathalie Maheu récolte les raisins des vignes du campus Macdonald pour en faire du vin. / Photo : Caitlin MacDougall

Le programme de niveau collégial a formé des centaines de producteurs agricoles au fil des décennies

Par Julie Fortier

Nathalie Maheu a toujours su qu’elle voulait travailler dans le domaine de l’agriculture. « J’aime le travail manuel et j’ai toujours aimé travailler avec les animaux et être près de la nature », indique la jeune femme de 19 ans, qui a grandi à Saint-Jules, en Beauce, sur une ferme qu’exploitent conjointement sa famille et celle de sa tante.

Inscrite au programme de Gestion et technologies d’entreprise agricole (GTEA), qui mène à l’obtention d’un diplôme d’études collégiales (DEC) en formation technique, Nathalie a choisi McGill en raison de la « bonne réputation » de l’institution et pour approfondir sa connaissance de l’anglais. Mais étudier à McGill, c’est aussi une tradition familiale chez les Maheu-Roy, puisque huit cousins ont fréquenté le campus Macdonald, dont quatre au programme de GTEA.

C’est un peu la même chose chez les Breault de Saint-Georges-de-Clarenceville. Michael, en 2e année de GTEA, est le sixième de sa famille à suivre ce programme de formation à McGill, après ses parents – qui se sont rencontrés pendant leurs études –, son oncle et deux de ses frères aînés.

Michael Breault évalue la croissance du poinsettia qu’il fait pousser dans le cadre de son cours de botanique. / Photo: Caitlin MacDougall
Michael Breault évalue la croissance du poinsettia qu’il fait pousser dans le cadre de son cours de botanique. / Photo: Caitlin MacDougall

Avant de s’inscrire au programme de GTEA, Michael n’était pas certain de vouloir rester sur la ferme familiale. « Mais dès que j’ai commencé, j’ai tout de suite su que c’est ce que je voulais faire, lance-t-il. Ça m’a confirmé que j’aimerais rester à la maison, sur la ferme. C’est nouveau pour moi d’aimer l’école. J’aime le fait d’approfondir des choses que j’ai faites toute ma vie, des choses que j’aime faire. Ensuite, lorsque je retourne chez moi, je m’investis davantage. »

Ses parents, Serge Breault et Monica Muller, possèdent une ferme laitière dont la production a quadruplé depuis 30 ans. L’un des fils, Timothy, a acheté des parts de la ferme familiale et l’aîné, Éric, est maintenant propriétaire de l’exploitation voisine. Monica Muller estime que le programme d’études de GTEA est stimulant pour tous.

« [Nos fils] reviennent de l’école motivés et intéressés, et c’est certain que ça nous motive nous aussi, comme parents. Ça nous encourage à avancer et à investir [dans la ferme] parce qu’on voit qu’ils veulent continuer », souligne Mme Muller, diplômée de la cohorte de 1985.

Un programme centenaire en constante évolution

Si la création d’un programme en gestion d’entreprise agricole date de l’ouverture du Collège Macdonald, en 1907, sa mouture actuelle, régie par le ministère de l’Éducation, remonte à 1985. Le programme de trois ans est également offert dans une douzaine de cégeps.

Le cursus du programme de McGill a été modifié régulièrement au fil des ans afin de refléter l’évolution des exigences du secteur de la production agricole. « Faire partie de McGill nous offre davantage de flexibilité pour adapter le contenu des cours et la façon dont nous enseignons que si nous étions dans un cégep, où la rigidité des conventions collectives limite ces possibilités », indique Serge Lussier, directeur adjoint du programme, qui y enseigne depuis 1980.

Une grande place est réservée à l’enseignement de la gestion, incluant le développement des compétences en communication. « Nous insistons maintenant davantage sur les compétences non techniques (« soft skills ») car nous voulons que nos diplômés soient des leaders au sein de leur communauté et dans leur entreprise. L’époque du fermier seul dans son champ – si elle a déjà existé – est révolue », explique Peter Enright, directeur du programme.

Le programme comprend notamment des cours en sciences des plantes et des sols, en anatomie et génétique animales, en production animale, en production maraîchère, en entretien de la machinerie et des bâtiments, en comptabilité, en ressources humaines et en gestion, ainsi que des stages.

Une vingtaine d’étudiants terminent le programme avec succès chaque année. Des deux tiers aux trois quarts d’entre eux travaillent ensuite en production agricole. La plupart des étudiants ont grandi au sein d’une famille qui gère une ferme (au Québec ou, dans certains cas, dans l’est de l’Ontario), ce qui mène inévitablement à un style d’enseignement très interactif », selon Peter Enright. Les étudiants ont déjà une expérience pratique, alors ils veulent vite savoir « de quelle façon ils pourront utiliser ce qu’ils sont en train d’apprendre », dit-il.

« Nous n’avons pas le choix d’être toujours au courant [des meilleures pratiques], renchérit Pascal Thériault, qui enseigne l’économie et la gestion, car les opérations agricoles sont de plus en plus complexes et les étudiants ont tous un exemple concret et différent à nous présenter. Et nous devons être en mesure de leur offrir des réponses qui soient applicables à leur ferme. »

Comme épreuve synthèse, en troisième année, chaque étudiant doit préparer un plan d’affaires et le présenter à la classe. Nathalie Maheu, qui retourne chaque week-end travailler à la ferme familiale, planche déjà sur le sien : elle veut étendre la production maraîchère de sa ferme, axée pour le moment sur la production laitière et porcine. « Pour l’instant, nous n’avons qu’un hectare de fruits et de légumes et [la récolte] ne sert qu’à notre consommation. J’aimerais que nous puissions étendre la production à trois hectares et en vendre une partie. »