Ceux qui ont faim

Hugo Melgar-Quiñonez, directeur de l'Institut pour la sécurité alimentaire mondiale de l'Université McGill, collabore avec la FAO pour recueillir des données plus précises sur l’insécurité alimentaire dans le monde.
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Hugo Melgar-Quiñonez / Photo : Will Lew

Hugo Melgar-Quiñonez collabore avec la FAO pour recueillir des données plus précises sur l’insécurité alimentaire dans le monde 

Par Julie Fortier

Des données provenant de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) indiquent qu’environ 800 millions de personnes sont sous-alimentées dans le monde. Cependant, ce chiffre ne permet pas à lui seul d’obtenir un portrait fidèle de l’insécurité alimentaire, affirme Hugo Melgar-Quiñonez, directeur de l’Institut pour la sécurité alimentaire mondiale de l’Université McGill.

« La FAO estime, en fonction de la quantité de produits alimentaires disponibles pour la consommation dans un pays, si les besoins caloriques de la population sont satisfaits, précise-t-il. Toutefois, cette estimation repose sur un mode vie sédentaire et, par conséquent, il s’agit d’un scénario optimiste. Dans les zones rurales et les endroits où la subsistance dépend d’un travail plus physique, les besoins caloriques sont supérieurs, et l’ampleur du problème peut être accrue. »

De plus, cet indicateur ne tient pas compte de la qualité nutritionnelle des produits alimentaires disponibles. Comme le souligne le Dr Melgar-Quiñonez, « quelqu’un qui ne mangerait que du pain blanc ou du riz blanc mourrait très rapidement ». Le spécialiste en nutrition, qui est également médecin, indique que 1,5 milliard de personnes ont une carence en fer et qu’un tiers de la population mondiale a une carence en zinc, deux nutriments «essentiels à la vie et à la fonction immunitaire ».

Ainsi, une nouvelle façon de mesurer l’insécurité alimentaire aiderait à en dresser un portrait plus fidèle à l’échelle mondiale. Le projet Voices of the Hungry de la FAO a recours à un questionnaire qui, intégré au sondage mondial Gallup, permet de recueillir des données dans plus de 150 pays. Le questionnaire est inspiré de l’échelle de sécurité alimentaire de l’Amérique latine et des Antilles utilisée dans une vingtaine de pays par le Dr Melgar-Quiñonez et ses collègues, qui repose sur un outil en usage aux États-Unis et au Canada depuis la fin des années 1990.

Cette échelle expérientielle compte huit questions qui demandent aux gens des renseignements sur la variété et la qualité nutritionnelle de ce qu’ils mangent, et s’ils ont eu à sauter un repas ou ont manqué de nourriture au cours des douze derniers mois. Répété chaque année, le questionnaire permettra de mesurer la gravité de l’insécurité alimentaire mondiale.

« Pour aider les personnes qui souffrent de la faim, il faut savoir qui sont ces gens et où ils vivent, ajoute le Dr Melgar-Quiñonez, qui a fait partie du groupe consultatif pour le projet Voices of the Hungry. Ce projet permet de mettre rapidement en place un outil valable et fiable, à prix abordable, dans la majorité des pays, y compris des endroits où la sécurité alimentaire n’a jamais été mesurée. »

Grâce à la collaboration du Dr Melgar-Quiñonez avec la FAO, l’Université McGill a obtenu l’accès à l’ensemble des données du sondage mondial Gallup. « Il s’agit d’un immense corpus de données sur les facteurs déterminants et les conséquences de l’insécurité alimentaire, ce qui nous offre de nombreuses possibilités de recherche sur lesquelles nos étudiants aux cycles supérieurs travaillent dans le nouveau laboratoire de données sur la sécurité alimentaire mondiale de l’Université McGill. »