Repère historique 1956
Comme beaucoup de jeunes gens motivés, Thomas Chang avait l’habitude de prolonger sa journée de travail à la maison, à ceci près que son travail–tâche quasi impossible– consistait à créer la première cellule sanguine artificielle au monde, et que son chez-soi était sa chambre de résidence au Pavillon Douglas de l’Université McGill, où, en 1956, alors âgé de 23 ans, il menait des études de 1er cycle.
Fait remarquable, il y est parvenu. À l’aide de matériel improvisé, notamment d’atomiseurs de parfum, il a réussi à créer une poche de plastique perméable d’environ un millimètre de diamètre, capable de transporter l’hémoglobine presque aussi efficacement qu’une cellule sanguine naturelle. En 1989, la revue New Scientist a écrit que le projet de recherche du jeune étudiant–une idée«simple, élégante et intellectuellement ambitieuse»–avait donné naissance à «une branche dynamique de la recherche et du développement biomédical».
Thomas Chang a par la suite poursuivi sa remarquable carrière à la tête du Centre de recherche sur les cellules et organes artificiels de l’Université McGill. À la fin des années 1960, il a découvert que des enzymes transportées par des cellules artificielles pouvaient corriger certains troubles du métabolisme. Il a également créé des cellules remplies de charbon de bois pour traiter les intoxications médicamenteuses, une technique aujourd’hui courante. Ses travaux visant à trouver un substitut sanguin sécuritaire ont contribué à accroître sa renommée à la suite des scandales du sang contaminé mis à jour au Canada au cours des années 1980 et 1990. En 1991, M. Chang a reçu l’Ordre du Canada.
Même s’il a été un temps considéré comme candidat possible au prix Nobel, Thomas Chang n’a pas perdu de vue sa motivation première:«Je crois que pour le scientifique, ce qui importe le plus est ce qui est le plus utile au patient, pas ce qui est utile à sa réputation ou ce qui rapporte le plus d’argent. Le patient doit être la principale source de motivation de notre travail.»