Le brevet…

Le brevet est-il un moyen efficace de partager une idée? Oui.

« En règle générale, les gens souhaitent l’enregistrement de brevets », explique John DiMaio, directeur du Bureau de transfert de technologies de McGill (BTT). L’an dernier, 500 000 demandes de brevets ont été soumises auprès du Bureau des brevets et des marques de commerce des États-Unis. M. DiMaio précise toutefois que les universités nord-américaines ne sont dépositaires que de deux pour cent des brevets accordés. « Mises ensemble, les universités d’Amérique du Nord ont obtenu un nombre de brevets similaire à celui accordé à IBM. La différence réside dans l’étendue des percées mises au jour par les établissements universitaires, laquelle incite les entreprises à investir temps et argent dans leur concrétisation », ajoute-t-il.Les chercheurs aspirent à servir le bien commun. Paradoxalement, leur premier réflexe, qui est de publier et de divulguer leurs connaissances, peut se révéler contre-productif. « Le succès de certains médicaments – issus de travaux avant-gardistes ayant mené au développement clinique ou à la pratique médicale – est attribuable à l’adoption de stratégies judicieuses et responsables. C’est également le cas de solutions diagnostiques, de procédés et d’innovations diverses dont bénéficie l’ensemble de la société », a-t-il conclu.

Le brevet est-il la seule solution pour partager une idée? Pas nécessairement.

Pour le Groupe d’experts en biotechnologie, innovation et propriété intellectuelle (PI), dirigé par le professeur de droit Richard Gold, une nouvelle ère s’ouvre. Subventionné par le CRSHC, le groupe a proposé un modèle pour le rôle joué par la PI au sein de l’innovation biotechnologique. Cette étude a pris appui sur l’expertise et l’expérience d’un réseau international de représentants de l’industrie, d’universités, de gouvernements et d’ONG. Il en ressort que la manière dont les universités, les jeunes entreprises et de nombreuses sociétés utilisent la PI constitue à bien des égards un frein pour l’innovation.« Le système actuel considère que l’accroissement du niveau de protection par la PI est bénéfique », explique le Pr Gold. « Si c’était vrai il y a 30 ans, le monde a changé, et nous devons modifier notre manière d’appréhender la PI. Le groupe propose de miser sur la coopération et la collaboration plutôt que sur le pro­tectionnisme ».

« Nul ne possède toutes les connaissances requises pour faire avancer seul les technologies de pointe », ajoute Pr Gold. « Nous devons trouver des solutions de sorte que les échanges d’idées soient plus rapides et efficaces ». Il en veut pour exemple une nouvelle initiative : le Consortium de génomique structurelle, qui fédère des chercheurs pour créer des sondes destinées à l’étude de protéines utiles à la recherche épigénétique. L’intérêt de ce consortium tient à ce que les sondes ne soient pas protégées par des brevets et qu’elles soient mises à la disposition de tous. Cela ne sonne pas pour autant le glas de la PI, s’empresse de rappeler le Pr Gold, en citant l’exemple de projets destinés à améliorer l’accès aux médicaments anti-VIH et antisida dans les pays africains, en cédant des brevets sous licence à une « autorité indépendante qui cédera à son tour ces licen­ces à des fabricants de génériques dans les pays en développement ».

« Si vous voulez que les recherches universitaires changent le monde, il faut trouver des moyens, avec ou sans la PI », conclut-il.