Le professeur de sciences politiques et d’études islamiques Khalid Medani souhaite comprendre la montée du fondamentalisme islamique au Soudan et l’intérêt qu’il porte à cette question n’est pas strictement universitaire.
Khalid Medani est né au Soudan, devenu depuis le coup d’État de 1989 le premier pays à tomber entièrement aux mains des fondamentalistes islamiques. Pendant la première année de son règne, le nouveau gouvernement a tué un groupe de trafiquants du marché noir notamment formé d’une connaissance du Pr Medani.
« Après cette exécution, je n’ai eu de cesse de vouloir comprendre les liens entre les institutions formelles et informelles et la notion d’identité dans l’islam », se souvient-il. « Je voulais savoir comment et pourquoi ils avaient pris le pouvoir. » Khalid Medani n’était pas le seul à s’interroger ainsi. « Lorsque les fondamentalistes se sont emparés du pouvoir au Soudan, multipliant incarcérations et actes de torture, mes collègues m’ont dit : “Pourquoi ne fais-tu pas de recherches afin d’informer le monde à ce sujet?” Les musulmans essaient de comprendre ce qui est en train de se produire à l’égard de leur religion et de leur pays. »
Les travaux de Khalid Medani ont bénéficié d’un formidable encouragement lorsqu’il a reçu une bourse Carnegie de deux ans d’une valeur de 100 000 dollars. Il est le seul chercheur implanté au Canada choisi par la corporation new-yorkaise Carnegie, un organisme de financement sans but lucratif fondé en 1911 par l’homme d’affaires et philanthrope Andrew Carnegie.
Khalid Medani étudiera les différents facteurs qui conduisent les jeunes musulmans à intégrer les groupes fondamentalistes au Soudan, ainsi qu’en Somalie et en Égypte. Son approche est diversifiée et consiste à interroger et à mener des enquêtes auprès de musulmans ordinaires, tout en conduisant des recherches historiques. Il souhaite s’imprégner des différents facteurs (idéologiques, sociopolitiques, histoire de l’emploi parmi les populations locales, niveau de pauvreté, fidélité ethnique ou tribale) qui facilitent le recrutement par les groupes fondamentalistes.
Khalid Medani se rendra également en Afrique pour étudier la prolifération des « hawwalat », organismes islamistes d’aide non réglementés, et le rôle des « alahi », mosquées privées qui fournissent un environnement propice au recrutement de jeunes militants.