Les résultats d’une recherche récente menée par un chercheur mcgillois semblent indiquer que les efforts engagés depuis 20 ans pour lutter contre l’onchocercose, ou cécité des rivières, risquent d’être sérieusement compromis.
Dirigée par Roger Prichard, titulaire d’une Chaire James McGill à l’Institut de parasitologie de l’Université, l’étude révèle une recrudescence inquiétante de la population de vers parasites à l’origine de la maladie dans certains villages d’Afrique de l’Ouest, en dépit des traitements traditionnels. L’ivermectine est le seul médicament largement utilisé dans le traitement de la cécité des rivières ; la présence d’un parasite résistant à l’ivermectine pourrait être synonyme de catastrophe sanitaire pour les habitants des régions touchées.
« Nous avons décelé les premières traces de résistance », déclare le Pr Prichard, « et identifié des régions où les parasites adultes continuent de se reproduire et de transmettre la maladie. Dans certains villages, la situation semble empirer. »
L’étude, dont les résultats ont été publiés dans Lancet, a porté sur 2 501 personnes infectées dans 20 communautés avoisinantes du Ghana. Two McGill graduate students, Mike Y. Osei-Atweneboana et Jeff K. L. Eng, ont mené l’essentiel des recherches en partenariat avec les autorités sanitaires locales.
« Cette découverte incite fortement à croire que la maladie pourrait resurgir et prendre les proportions d’un véritable fléau », souligne le Pr Prichard. Sans une lutte adéquate, les parasites résistants pourraient semer la panique dans les zones où les interventions thérapeutiques à grande échelle avaient jusqu’à présent permis de circonscrire la maladie.
La cécité des rivières est transmise à l’humain par la piqûre d’une mouche noire qui colonise les berges des cours d’eau rapides fortement oxygénés. En plus de causer une cécité irréversible, elle provoque de graves démangeaisons et des lésions cutanées qui entraînent généralement la dépigmentation et l’apparition de taches évoquant celles du léopard.
L’Organisation mondiale de la Santé estime que 99 pour cent des 18 millions de personnes infectées dans le monde vivent en Afrique, le reste se trouvant en Amérique latine et au Yémen. L’ivermectine se borne à arrêter la progression de la maladie, sans pour autant détruire les parasites adultes, et il n’existe pour l’heure aucun vaccin. Après le trachome, la cécité des rivières est la deuxième plus grande cause infectieuse de cécité.
Cette recherche est financée par le Programme spécial de recherche et de formation sur les maladies tropicales de l’UNICEF-PNUD-Banque mondiale-Organisation mondiale de la Santé, le Programme de lutte contre l’onchocercose, le Programme africain de lutte contre l’onchocercose, le gouvernement du Ghana, les Instituts de recherche en santé du Canada et le Fonds québécois de la recherche sur la nature et les technologies.