On dit que le paludisme se contracte rapidement et se détecte difficilement. Une invention pourrait toutefois modifier radicalement cette affirmation en donnant une autre couleur à la maladie.
Pour l’heure, les techniciens détectent le paludisme en colorant des lames badigeonnées de sang au moyen de la coloration de Giemsa, qui marque l’ADN des parasites de la maladie. Ils examinent ensuite minutieusement les échantillons sanguins colorés au microscope optique. Ce processus est laborieux et les techniciens doivent compter manuellement toutes les cellules sanguines visiblement infectées pour déterminer si leur nombre dépasse la limite de détection, ce qui nécessite des compétences très particulières. Une équipe de recherche, dirigée par Paul Wiseman des départements de physique et de chimie de l’Université McGill, a élaboré une technique beaucoup plus rapide et conviviale. Ce nouveau processus est basé sur un effet optique connu sous le nom de troisième génération harmonique, qui amène l’hémozoïne, une substance cristalline sécrétée par le parasite du paludisme, à se colorer en bleu lorsqu’elle est irradiée par un laser infrarouge.
Dans l’article qu’ils ont publié dans le Biophysical Journal, les chercheurs indiquent que cette technique pourrait éliminer la nécessité d’une formation spécialisée, l’utilisation de lames, d’agents de contraste et de microscopes et ainsi mettre fin à un travail fastidieux et chronophage. En outre, plus vite le diagnostic de paludisme sera posé (les premiers symptômes se manifestent généralement 10 à 15 jours après l’infection), plus vite la maladie sera traitée. Un traitement précoce permet d’éviter les complications et réduit le risque de décès de manière spectaculaire.
Chaque année, jusqu’à 500 millions de personnes contractent le paludisme (qui est essentiellement transmis par les anophèles femelles) et un à trois millions de personnes en meurent. Les décès se concentrent en Afrique subsaharienne, où le diagnostic est souvent retardé en raison de la pénurie de personnel adéquatement formé et d’équipement. Cette maladie est également présente en Asie, en Europe, en Amérique latine et au Moyen-Orient.
Paul Wiseman et ses collègues espèrent à présent adapter les technologies existantes, dont les communications laser à fibre optique et la technologie de tri cellulaire, pour sortir rapidement cette technique du laboratoire. « Nous imaginons une unité autonome qui pourra être utilisée dans les cliniques de pays où le paludisme est endémique », souligne-t-il. « L’opérateur n’aura qu’à injecter l’échantillon cellulaire directement dans le dispositif et obtenir le compte total de cellules infectées, sans intervention manuelle. »
Cette recherche est financée par le CRSNG, le Réseau des Centres d’excellence, l’Institut canadien d’innovation photonique, la FCI et les IRSC.