Montréal, plaque tournante de l’intelligence artificielle

L’arrivée imminente d’un nouvel Institut de recherche en intelligence artificielle et la grappe industrielle annoncée cette semaine par Québec permettra à Montréal de consolider la place qu’elle s’est taillée dans cette industrie.

L’arrivée imminente d’un nouvel Institut de recherche en intelligence artificielle (IA) et la grappe industrielle annoncée cette semaine par Québec permettra aux acteurs de ce milieu de façonner la « révolution industrielle » annoncée par l’IA.

En ajoutant à cette grappe la stratégie pancanadienne en IA, qui mènera prochainement à la création d’un institut de recherche à Montréal, la métropole aura tous les éléments nécessaires afin de consolider la place qu’elle occupe dans ce secteur économique en pleine ébullition, dit Doina Precup, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en apprentissage automatique à l’Université McGill.

Tel qu’annoncé lundi, la grappe bénéficiera d’un investissement provincial de 100 millions au cours des cinq prochaines années dans le but de stimuler la recherche et l’innovation en IA.

« C’est une occasion rêvée de créer un centre névralgique autour duquel tous les acteurs en IA vont pouvoir se réunir et interagir, dit-elle. Ces structures vont permettre de renforcer la synergie qui s’est créée à Montréal. »

Partager son expertise

Depuis plusieurs années, Montréal s’est en effet taillé une réputation de joueur important dans le milieu IA grâce aux universitaires, start-ups et géants de l’informatique — dont Google et Microsoft — qui ont décidé d’établir domicile dans la métropole.

Plus que jamais, les chercheurs ont toutefois besoin d’un endroit où se réunir pour faciliter les collaborations et leur permettre de bénéficier des compétences de leurs collègues.

« Nous avons vraiment différentes perspectives et nous avons besoin des compétences et des outils de chacun pour résoudre différents problèmes. Il sera important de créer un environnement où nous allons pouvoir en profiter et interagir au quotidien », se réjouit Mme Precup, qui siégera au comité d’orientation de la grappe industrielle à titre d’observatrice.

Une nouvelle « révolution industrielle » et des défis éthiques

Le concept de l’IA demeure, pour le commun des mortels, une idée abstraite et relève presque de la science-fiction. Cette technologie commence pourtant à s’immiscer dans notre quotidien. On a qu’à penser aux systèmes de reconnaissance vocale de plus en plus sophistiqués dont sont aujourd’hui dotés nos téléphones. Grâce aux progrès rapides de l’IA, la tendance ira en s’accélérant et de nombreux secteurs, notamment la médecine, seront chambardés.

« C’est vraiment le début d’une nouvelle révolution industrielle et ça va profondément bouleverser la société, notamment le marché du travail. C’est sûr qu’on va voir des emplois disparaître, mais d’autres seront créés », explique Doina Precup.

Même si elle se dit convaincue que l’IA aura surtout des bienfaits pour la société, les chercheurs se doivent d’être proactifs afin d’éviter d’éventuels dérapages. Ce n’est pas que l’IA soit foncièrement mauvaise, mais plutôt que « les données avec lesquelles on programme le système peuvent poser problème. »

« C’est un peu comme lorsqu’on élève un enfant, il va imiter ce qu’il entend à la maison, explique-t-elle. On se rend donc compte que si l’on veut utiliser l’IA afin de faire des prédictions sur la criminalité ou établir des primes d’assurance, il va falloir que les systèmes informatiques reçoivent des données objectives et dépourvues des préjugés que l’on retrouve dans la société. »

L’institut sera donc l’occasion de réfléchir à ces questions et une partie de son mandat sera « d’étudier les manières que l’on peut mitiger les impacts sociaux de l’IA à court et moyen terme » en intégrant des sociologues, des éthiciens, des économistes et des juristes à l’équipe de recherche.

Intelligence artificielle en bref

Les scientifiques espèrent arriver à doter les ordinateurs « d’intelligence » en utilisant un concept appelé l’apprentissage automatique (machine learning). Il existe aujourd’hui plusieurs formes d’apprentissage automatique, notamment l’apprentissage profond (deep learning) et l’apprentissage par renforcement (reinforcement learning).

Apprentissage profond (deep learning)

L’Université de Montréal a plusieurs spécialistes en apprentissage profond. Ces systèmes sont dotés d’un « cerveau » composé d’un grand nombre d’unités de calculs qui, ensemble, imitent de manière simplifiée les neurones d’un cerveau humain. Les interactions entre ces « neurones » permettent au système d’apprendre progressivement à partir différentes données, comme des textes ou des images, qui lui ont été préalablement fournies. Les chercheurs pourraient par exemple présenter une série d’images d’une tasse afin que le système soit lui-même capable d’identifier cet objet par la suite.

Apprentissage par renforcement (reinforcement learning)

L’apprentissage par renforcement, une spécialité à McGill, est une catégorie d’apprentissage automatique où l’appareil apprend grâce à l’interaction avec son environnement, par essai et erreur, un peu comme le ferait un animal ou un enfant. Les chercheurs tentent ainsi de faire en sorte que la machine soit capable de raisonner afin de prendre une décision. Par exemple, une équipe de recherche composée de chercheurs de l’Université McGill a programmé un robot afin qu’il apprenne à nager en faisant appel à l’apprentissage par renforcement.