Changements climatiques : McGill rallie 60 chercheurs autour d’un plan d’action

La professeure de McGill Catherine Potvin a réuni des chercheurs de 30 universités canadiennes afin de proposer aux gouvernements un plan de développement durable qui faciliterait la transition du Canada vers une société sobre en carbone. L’initiative Dialogues pour un Canada vert a été lancée officiellement aujourd’hui, à Montréal.
Catherine-Potvin
Le groupe de chercheurs qu’a réuni Catherine Potvin a cerné 10 orientations politiques clés qui permettraient au Canada de réussir sa transition vers une économie sobre en carbone.

Catherine Potvin, professeure de biologie à McGill, a réuni des chercheurs de 30 universités canadiennes afin de proposer aux gouvernements un plan de développement durable qui faciliterait la transition du Canada vers une société sobre en carbone. L’initiative Dialogues pour un Canada vert a été lancée officiellement aujourd’hui, à Montréal. Nous en avons discuté avec elle.

D’abord, expliquez-nous en quoi consiste le projet Dialogues pour un Canada vert. 

À l’automne 2014, le secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, Ban Ki-moon, a exhorté tous les chefs d’État à mettre en place des politiques plus ambitieuses en matière de changements climatiques afin d’éviter que la hausse de la température mondiale ne dépasse 2 °C avant la fin du siècle. Depuis la Conférence Rio+20, il a maintes fois appelé à une plus grande contribution des scientifiques pour la résolution de problèmes environnementaux.

C’est en réponse à cet appel que j’ai invité des collègues de 30 universités canadiennes à se joindre à moi pour lancer Dialogues pour un Canada vert. Nous souhaitons encourager le débat public sur les politiques relatives aux changements climatiques en prévision des prochaines élections fédérales et de la prochaine conférence internationale sur le climat, prévue à Paris en décembre prochain.

Que peuvent faire les Canadiens pour lutter contre les changements climatiques?

L’un des plus grands enjeux en matière d’atténuation des changements climatiques est le transport. Les Canadiens sont toutefois limités par les choix dont ils disposent, notamment les véhicules offerts sur le marché et le nombre de projets d’habitation abordables et viables situés à proximité des transports en commun. Les gouvernements ont un rôle à jouer et les électeurs doivent examiner les politiques des différents partis en matière de changements climatiques lorsqu’ils votent.

Quelles mesures clés les gouvernements pourraient-ils adopter pour lutter contre les changements climatiques?

Notre groupe a cerné 10 orientations politiques clés qui permettraient au Canada de réussir immédiatement sa transition vers une économie sobre en carbone. Deux de ces mesures sont particulièrement importantes : 1) il faut imposer dès maintenant un prix sur le carbone partout au Canada. Ce n’est pas tellement différent de la taxe sur les cigarettes. Ceux qui sont source de « pollution par le carbone » doivent être ceux qui en paient le prix. 2) Nous devons nous assurer qu’il existe des connexions électriques entre les provinces qui produisent de l’hydroélectricité et celles qui n’en produisent pas.

Les changements climatiques sont coûteux. Comment entendez-vous financer le plan d’action que vous proposez?

Premièrement, l’inaction serait coûteuse. De nombreuses études ont démontré que le coût de l’adaptation aux changements climatiques grimpera en flèche si aucune mesure n’est prise pour les réduire, ce qui signifie que l’atténuation des changements climatiques serait possible « sans coût net » si nous agissons rapidement.

Deuxièmement, la transition vers une société sobre en carbone pourrait servir à propulser l’économie canadienne vers l’avenir, à la rendre plus concurrentielle et plus durable. Bien entendu, cela signifie que certains secteurs économiques connaîtront un repli et d’autres, un essor. C’est exactement ce que l’économiste Joseph Schumpeter appelle la destruction créatrice, soit le « processus de mutation industrielle qui révolutionne sans cesse de l’intérieur la structure économique, en détruisant continuellement ses vieux éléments et en créant continuellement de nouveaux éléments ». Toutefois, dans l’ensemble, les gains économiques, environnementaux et sociaux excéderont les pertes. Les secteurs qui, vraisemblablement, bénéficieront le plus de la transition sont ceux qui tentent de s’ajuster de façon proactive.

Enfin, le Canada s’emploie actuellement à renouveler la plus grande partie des infrastructures construites dans les années 1960 et 1970. Il sera beaucoup moins coûteux d’intégrer ces stratégies d’atténuation aux nouvelles infrastructures que de corriger des erreurs dans 10 ou 15 ans.

Catherine Potvin est titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur l’atténuation des changements climatiques et de la Chaire UNESCO Dialogues pour un avenir durable. 

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