Voici les cerveaux derrière le fauteuil roulant intelligent de McGill

Des étudiants de McGill construisent une chaise roulante propulsée par le cerveau en à peine 30 jours
De gauche à droite : Jenisha Patel, Claudia Leung, Anna Brandenberger, Simon Tartakovsky, Danielle Nadin, Marley Xiong et Raffi Hotter présentent Milo aux bureaux de Google la semaine dernière.

Marley Xiong et Jenisha Patel voulaient monter un projet ensemble – n’importe quel projet.

« Du moment qu’il s’agissait d’interfaces cerveau-ordinateur, » dit Xiong.

Bien évidemment.

Et c’est exactement ce qu’elles ont fait, appuyées par une équipe d’une trentaine d’ami(e)s et de collègues de McGill NeuroTech, tous étudiants en ingénierie, en sciences ou dans les arts.

Leur création, la chaise roulante intelligente Milo, a vu le jour à peine 30 jours plus tard. Milo – l’acronyme anglais pour mind-controlled locomotive – a été leur contribution au concours étudiants de NeuroTechX lancé en février.

« Au début, Jenisha et moi » échangions des idées, de dire Xiong, une étudiante en biologie et sciences informatique de 21 ans. « Une semaine plus tard, le 24 février, on a réuni une équipe. En l’espace de sept jours, on est devenu un groupe de 35 personnes, et on a tous réfléchi à ce qu’on pouvait bien bâtir. »

« Le 1er mars, on a reçu le fauteuil roulant (dépouillé) et le 31 mars, on a filmé la démo » avec le produit fini, une chaise roulante guidée par électroencéphalographie – activité électrique du cerveau – conçue pour offrir une meilleure autonomie aux personnes lourdement handicapées, comme la paralysie.

« Le 31, on s’est levé à 7 heures en priant que ça marcherait, » dit Xiong. « Et en effet, ça a marché. C’était la dernière chose à laquelle on s’attendait. »

Pas parce qu’elle est pessimiste, mais plutôt parce qu’assembler une machine complexe et futuriste comme celle-ci à partir de zéro en un mois est tout un tour de force.

Une telle machine est loin d’être la première, mais c’est quand même une réussite impressionnante pour un groupe d’étudiants de premier cycle.

La puissance mentale

Les mouvements de la chaise sont commandés par de l’information envoyée du cerveau, explique Raffi Hotter, 19 ans, un étudiant en math et informatique. Quatre électrodes sont raccordées à l’arrière de la tête du conducteur d’essai et des ondes cérébrales – les signaux – envoient des commandes à la chaise de virer à gauche ou à droite. Des capteurs détectent des personnes ou des obstacles et donnent des ordres à la chaise de réagir en conséquence en tournant, en ralentissant ou en s’arrêtant.

La tâche initiale de Hotter consistait à concevoir le logiciel, tandis que Xiong développait les algorithmes pour déceler les schémas de pensées.

En serrant les mâchoires, la personne fait avancer ou arrêter le fauteuil roulant.

« Mais également si la personne imagine tourner à gauche – simplement en imaginant, nous pouvons obtenir un signal qui force la chaise à tourner à gauche. »

« Nous leur avons demandé de songer à remuer leur main gauche ou droite – ce à quoi ressemble quelqu’un qui songe à sa gauche ou sa droite en terme d’ondes cérébrales – et on a créé tout en ensemble de logiciel à partir de ça, » a dit Hotter.

« On a ensuite transmis cette information à l’algorithme qui était fait pour qu’on puisse lui dire ‘ Regarde, ces données correspondent à la personne qui pense gauche ou droite. ’ L’algorithme peut alors proposer une représentation de ce que veut dire tourner à gauche pour le cerveau. »

Bref, elle transforme une pensée en geste physique.

« C’est génial, » s’exclame Xiong. « On adore l’observer travailler. »

« C’est presque de la science-fiction, » ajoute Hotter.

Xiong explique « qu’on ne peut pas simplement imaginer une pomme ou un café pour qu’ils émettent une onde spécifique. Mais c’est différent avec l’imagerie motrice. C’est un signal très robuste. »

Traduire des pensées en actions physiques

Généralement, un projet de cette envergure prendrait plusieurs mois, selon Hotter, qui a ajouté des fonctions telles que l’envoi d’un texto et la capacité de transmettre la position précise au personnel soignant de la personne en fauteuil roulant en cas de stress élevé.

« Tellement de choses auraient pu mal tourner, » a dit Xiong. « Premièrement, la chaise doit faire ce que le logiciel lui dit de faire ; le logiciel doit appliquer les données de manière réglementée, donc il doit être bien ficelé ; les électrodes doivent être bien attachées ; et enfin, si tout ça fonctionne, le cerveau doit fonctionner. »

Outre la supervision du projet en tant que chef d’équipe, Xiong a également dirigé l’équipe ‘machine learning,’ responsable de transformer les pensées en commandes physiques.

« C’était vraiment une moyenne de 50 heures par semaine,” dit Xiong. « À vrai dire, j’ai séché mes cours à cause de ce projet. »

L’équipe a présenté la chaise roulante à Google la semaine dernière. De plus, des professeurs à McGill se sont dits intéressés à collaborer pour poursuivre des recherches empiriques en lien avec le fauteuil roulant.

« Il régnait une atmosphère formidable au sein de l’équipe, » a dit Xiong. « C’était notre projet tout à nous. Si tu n’apprends rien, il n’y a pas de projet. Tu es jeté dans ce milieu d’apprentissage. C’est pour ça qu’on s’est tellement amusé. »

Voire la vidéo ci-dessous pour en apprendre davantage sur Milo