Je riz, tu riz, elles rizicolent…

De gauche à droite: Stéphanie Mayer, Audrey Yank et Stéphanie Dumais ont rapidement tissé des liens avec la population du village de Gobé, au Bénin, lors de leur séjour de travail pour le Centre du riz pour l’Afrique.
De gauche à droite: Stéphanie Mayer, Audrey Yank et Stéphanie Dumais ont rapidement tissé des liens avec la population du village de Gobé, au Bénin, lors de leur séjour de travail pour le Centre du riz pour l’Afrique.

Par Stéphanie Dumais, Stéphanie Mayer et Audrey Yank

Arrivées dans la chaleur humide du Bénin il y a plus de six semaines, nous resterons en terre africaine trois mois afin de travailler sur les problématiques liées à l’étuvage du riz.

«Yovo! Yovo!» disent les enfants. («Blanc! Blanc!») «Micabo!» nous souhaitent les adultes. («Bonne arrivée!»)

Ici, impossible de passer inaperçues avec notre peau couleur de lait qui contraste tellement avec celle de la population locale. Malgré notre différence culturelle marquante, nous sommes accueillies à bras ouverts par la communauté béninoise. Ensemble, avec un professeur de notre département à McGill, Robert Kok, nous travaillons en collaboration avec le Centre du riz pour l’Afrique (ADRAO) et quelques ONG locales afin de développer des solutions techniques aux enjeux énergétiques de la production du riz étuvé.

Au Bénin, cette céréale occupe une place importante dans les habitudes culinaires locales. Traditionnellement, le riz consommé en Afrique est étuvé, contrairement à celui consommé dans d’autres régions du globe. À l’œil nu, le grain de riz étuvé a une appa-rence beaucoup plus translucide. Sa production diffère de celle du riz non étuvé par l’introduction d’une étape de pré-cuisson du riz à la vapeur. Ensuite, comme pour le riz non étuvé, les grains sont séchés puis soumis au décorticage afin d’obtenir le riz blanc tel que nous l’achetons au marché. Cette méthode est favorisée puisqu’elle procure aux grains de riz une valeur nutritive plus importante et les populations locales apprécient davantage le goût du riz ainsi obtenu.

Il est à noter que ce pays possède un potentiel de développement non négligeable dans la filière du riz. Lors de notre visite dans quelques villages de la brousse, nous avons eu l’occasion d’admirer une panoplie de champs cultivés, tous plus verdoyants les uns que les autres. De plus, en cette saison des pluies, nous avons pu faire l’expérience des averses qui inondent à chaque fois les rues de la ville et qui irriguent très bien par le fait même les terres agricoles. C’est ici que l’expression «pleuvoir à boire debout» prend tout son sens!

Cependant, la culture du riz au Bénin ne permet pas de répondre à la demande locale. Le pays importe des quantités de riz beaucoup plus importantes que ce qu’il produit. Nous avons constaté que les outils manuels dont disposent les agriculteurs ne peuvent suffire à alimenter un marché de grande échelle. Le besoin d’améliorer l’efficacité et l’organisation des ressources est criant, surtout pour permettre la production d’un riz de meilleure qualité, en plus grande quantité et à un prix plus compétitif. Afin de pallier aux problématiques d’efficacité énergétique de la transformation du riz et de la surconsommation du bois, trois objectifs principaux ont été ciblés pour notre projet. Ceux-ci ont été définis comme suit: le développement d’un foyer amélioré, la conception d’un instrument d’étuvage plus performant et la production d’un combustible alternatif à partir des résidus du décorticage.

Malgré l’orientation technique du projet, l’aspect humain y est omniprésent. Nous espérons apporter à la population villageoise du Bénin le plus grand soutien possible, mais finalement, ce sont les Africains qui risquent d’avoir un plus grand impact sur nous, surtout les étuveuses, ces femmes qui sont en charge du processus d’étuvage. Elles sont non seulement responsables de celui-ci, mais également de la majorité des travaux reliés à la culture du riz. Ce sont d’énormes marmites et des bassines remplies d’eau qu’elles soulèvent quotidiennement avec les muscles de leurs bras bien développés. Elles sont très dévouées, surtout lorsqu’elles se démènent pour rapporter le gagne-pain afin de nourrir toute la petite marmaille qui s’agite autour de la maisonnée. Elles dégagent une force de caractère digne d’une détermination et d’une endurance à toute épreuve. Les observer est une belle leçon d’humilité qui nous fait oublier pour quelques moments les petits maux de la vie quotidienne.

Nous voici donc plongées dans une réalité bien diffé-rente de notre quotidien habituel. Dans ce pays rayonnant de vie et de couleurs, les expé-riences rencontrées sont plus enrichissantes les unes que les autres. En effet, le contact avec cette culture africaine si riche et les liens que nous développons avec la communauté qui nous accueille nous permettront grandement d’évoluer en tant que personne. C’est l’école de la vie finalement, surtout qu’il paraîtrait que les voyages forment la jeunesse!

Stéphanie Dumais, Stéphanie Mayer et Audrey Yank sont étudiantes au département de génie des bioressources de McGill.