François Ricard accompagne Kundera dans la Pléiade

François Ricard

Par Julie Fortier

L’amitié entre Milan Kundera et François Ricard a débuté il y a une trentaine d’années, lors d’un passage au Québec de l’écrivain alors exilé en France.

« J’étais moins sensible à la dimension politique de son œuvre que l’étaient les Français et je crois que c’est ce qui nous a liés, raconte François Ricard, professeur au Département de langue et littérature françaises de McGill. Dès le départ, j’ai vu en lui le romancier davantage que le dissident politique. »

Pléiade inhabituelle

Ricard deviendra un collaborateur fidèle de l’auteur de L’Insoutenable légèreté de l’être et signera la postface de tous ses romans dans la collection Folio, en plus de publier, en 2005, une analyse de l’œuvre de Kundera, Le dernier après-midi d’Agnès (rappelant l’héroïne de L’Immortalité). Il est aujourd’hui considéré comme le meilleur spécialiste de l’œuvre du romancier.

Pas surprenant donc que Milan Kundera se soit tourné vers son complice québécois pour l’accompagner dans la publication de son œuvre intégrale au sein de la Pléiade, édition de luxe que l’on reconnaît à sa reliure en cuir pleine peau et dorée à l’or fin ainsi qu’à son papier bible. Kundera est l’un des rares écrivains à accéder de son vivant à la plus prestigieuse collection de la littérature française (et le seul membre en vie actuellement). Et François Ricard est le premier Québécois à signer seul l’ensemble des notices de référence d’une édition de La Pléiade.

Contrairement aux publications traditionnelles de La Pléiade, qui comprennent maints éléments de référence et d’analyse, dont annotations et chronologie détaillée de la vie de l’auteur, François Ricard n’a rédigé pour celle-ci – selon le souhait du romancier – qu’une préface et une « biographie » d’une vingtaine de pages pour chacun des 15 ouvrages publiés.

Le texte avant tout « Cela correspond tout à fait à la conception de l’œuvre littéraire de Kundera. Il veut que l’auteur s’efface le plus possible, et il s’est toujours prononcé contre toute forme d’annotation. Selon lui, le texte contient toute l’information nécessaire à sa compréhension », explique François Ricard.

Né en 1929 dans l’ex-Tchécoslovaquie, Milan Kundera fuit le pays communiste en 1975 pour s’installer en France.

Il en obtiendra la nationalité en 1981 et adoptera le français comme langue d’écriture, révisant également les traductions de ses romans écrits en tchèque (insatisfait de la première traduction en français de La Plaisanterie, qui dénature son style limpide et dépouillé, il la fera retraduire).

« J’ai été frappé par la beauté des romans de Kundera dès que je les ai découverts, se rappelle François Ricard. Sa vision de la vie, sa lucidité – que certains appellent son cynisme – m’ont touché et sont venues faire équilibre à mon autre amour littéraire, Gabrielle Roy. J’ai toujours eu un peu besoin de ces deux univers complètement différents. »

L’édition de La Pléiade de l’œuvre de Kundera sera disponible en librairie au Québec à compter du 18 avril.