Stephanie Posthumus et Tamara Sussman ont perdu des êtres chers, et bien qu’elles n’aient pas vécu cette épreuve de la même façon, elles se sont toutes deux aperçues que tout le monde n’avait pas la même compréhension du deuil dans le milieu universitaire, et que les membres du corps enseignant avaient besoin de ressources.
« J’ai cherché de l’information à propos du congé de deuil sur le site Web de l’Université, mais je n’ai pas trouvé grand-chose. Je me suis sentie vraiment perdue, se rappelle la Pre Posthumus. Heureusement, j’avais déjà participé à un atelier de l’Équipe-conseil en matière d’équité portant sur la diversité et l’inclusion. Comme j’avais établi un lien de confiance avec l’animateur, Tynan Jarrett, j’ai décidé de me tourner vers lui pour obtenir de l’aide. »
À son tour, Tynan Jarrett a fait appel à Angela Campbell, vice-principale exécutive adjointe à l’équité et aux politiques académiques. Ensemble, ils ont aidé Stephanie à s’y retrouver dans les procédures de l’Université, et ont réalisé la nécessité d’offrir des ressources à l’ensemble de la communauté. Tynan a ensuite eu l’idée de présenter Stephanie à Tamara Sussman, professeure agrégée à l’École de service social, qui connaît bien les systèmes de santé et l’incidence de la maladie sur les proches.
« Lorsque nous nous sommes rencontrées, je n’avais aucune idée de ce que Stéphanie souhaitait accomplir. Je possédais une certaine connaissance du processus de deuil, mais c’est à partir de cette première conversation que je suis passée de la théorie au vécu personnel », se remémore Tamara Sussman.
« Avant, je faisais ce qu’on fait habituellement dans le milieu universitaire : je me concentrais sur les données. C’est la vision de Stephanie qui m’a véritablement amenée à faire des liens entre mes expériences professionnelle et personnelle », ajoute-t-elle.
La dynamique départementale
Avec l’aide de l’Équipe-conseil en matière d’équité, Stephanie Posthumus et Tamara Sussman ont pris contact avec d’autres membres de l’Université McGill. Elles ont ainsi constaté que les niveaux de soutien variaient beaucoup et que les ressources accessibles étaient limitées.
« Lorsque vous assumez des tâches d’enseignement, de supervision et de recherche, vous pouvez sentir qu’il est de votre devoir de veiller à ce que le travail se poursuive sans alourdir la charge de vos collègues. Même si vous êtes en deuil, vous vous souciez de vos étudiants, de vos pairs et des échéances à respecter », confie la Pre Sussman.
Les professeures ont également constaté que la compréhension du deuil variait grandement selon les départements et les collègues.
« Souvent, on ne sait pas comment réagir. Doit-on présenter ses condoléances ou s’abstenir? Les personnes endeuillées savent-elles quelle aide elles peuvent obtenir des Ressources humaines ou du département? Pas toujours. En conséquence, il arrive que la personne endeuillée doive gérer elle-même la redistribution de ses tâches; la culpabilité s’ajoute alors à la peine », ajoute la Pre Posthumus.
Le manque de soutien peut avoir des répercussions importantes dans un cadre universitaire : il peut compliquer la collaboration, ternir les relations départementales, et pousser la personne endeuillée à prolonger son absence en raison du stress professionnel.
« La direction se préoccupe sincèrement du bien-être des membres du corps enseignant, mais la plupart des dirigeants universitaires n’ont pas les compétences nécessaires pour accompagner une personne qui vit un deuil ou qui traverse une crise », explique Angela Campbell, vice-principale exécutive adjointe.
« Cette initiative vise non seulement à offrir un soutien aux personnes qui en ont besoin, mais aussi à fournir aux dirigeants des outils à utiliser pour mieux épauler leurs collègues qui vivent un deuil douloureux. »
Guide de ressources et équipe de liaison
L’Université lance deux nouvelles ressources sur le deuil à l’intention du personnel, des directeurs et directrices de département, ainsi que des doyens et doyennes : une équipe de liaison et un guide en ligne.
Le guide renferme de l’information sur le deuil et propose des ressources. Certaines informations concernent l’ensemble des membres du personnel, notamment en ce qui a trait au congé de deuil et au Programme d’aide aux employés et à la famille (PAEF), tandis que d’autres s’adressent plus spécialement aux membres du personnel académique. On y aborde également les différentes façons de vivre un deuil et l’influence que peut avoir la situation professionnelle. À titre d’exemple, le fait de ne pas avoir sa permanence peut exercer une pression supplémentaire en situation de deuil.
L’équipe de liaison sera rattachée au Bureau du vice-principal exécutif. Stephanie Posthumus et Tamara Sussmanwill en seront les premières membres du personnel académique, et Anne-Marie Durocher, directrice de la planification et des opérations au Bureau du vice-principal exécutif et vice-principal aux études, assurera la coordination et le soutien. L’Équipe-conseil en matière d’équité jouera également un rôle, surtout durant la phase pilote.
« Nous commencerons par aider la communauté universitaire à mieux comprendre le deuil, notamment en expliquant que tout le monde ne réagit pas de la même façon et qu’il est essentiel de faire preuve de souplesse », explique Anne-Marie Durocher.
« Notre approche à trois volets consiste à offrir des ressources, de la formation et un accompagnement par les pairs. Nous aimerions créer un vaste réseau, organiser des ateliers et offrir des ressources de plus en plus pertinentes. »
Au cours du projet pilote, les membres de l’équipe souhaitent collaborer avec des pairs dans d’autres universités pour améliorer le soutien offert et lever les tabous liés au deuil.