Lancement du premier Festival de cinéma trans de Montréal

À la recherche d’une carrière après un doctorat à McGill, Iris Pintiuta a fondé Exposures, et bâti une communauté
Iris Pintitua

Iris Pintiuta ne perd pas de temps. En trois ans, iel a déménagé du Royaume-Uni à Montréal, a entrepris un doctorat en études cinématographiques à l’Université McGill et, tirant parti de son parcours universitaire pour se bâtir une carrière, a fondé un festival de cinéma et l’a transformé en organisme à but non lucratif.

Et tout cela, sans pratiquement l’aide de personne.

« [Le Festival de cinéma] me permet d’utiliser la recherche que j’accomplis à McGill – et de mettre en pratique toute une gamme de compétences – dans mon travail, explique Iris. C’est mon bébé, en quelque sorte; l’événement grandit et les choses se passent mieux que je m’y attendais. »

 

L’amour du cinéma

Originaire de Roumanie, Iris a vécu près de 10 ans au Royaume-Uni. Après l’obtention de deux diplômes du King’s College, un au premier cycle et un au cycle supérieur, iel s’est découvert une véritable passion pour le cinéma.

« Je me suis beaucoup concentré sur le cinéma expérimental et, à la maîtrise, j’ai eu un véritable coup de foudre pour le cinéma queer et trans, se rappelle-t-iel. J’ai découvert des œuvres riches et sous-estimés qui brossent des portraits nuancés, complexes et sérieux de personnes trans. Je voulais absolument en apprendre plus sur ce cinéma. »

C’est avec l’objectif de suivre des études doctorales et de poursuivre une carrière universitaire qu’Iris Pintiuta a fait son entrée à McGill. Iel y a cependant réalisé que les possibilités de carrière universitaire étaient passablement limitées et qu’il valait mieux s’employer à soutenir les membres de la communauté faisant l’objet de ses recherches.

« Trop souvent, les données de recherches sur la population queer et trans ne sont pas transmises aux personnes concernées. Je voulais changer cet état de fait en établissant un pont entre le savoir universitaire et le public, et en faisant profiter ma communauté de mes connaissances – pas seulement pour faire avancer ma carrière. »

Constatant une lacune dans l’offre cinématographique montréalaise, Iris a entrepris d’organiser des projections de films informelles dans un bar queer.

« Ça a commencé comme une activité entre ami(e)s, explique-t-iel, mais le bouche-à-oreille a fait son œuvre et dès la troisième ou la quatrième présentation, il y avait plus de monde qu’on pouvait en accueillir. Je ne comprenais pas ce qui arrivait, c’était un peu fou! »

 

La naissance d’un projet

Peu après avoir appris qu’il n’y avait plus de festival annuel de cinéma transgenre au Canada depuis 2002, Iris Pintiuta a décidé de prendre les choses en main. Et en septembre 2024, Exposures, le premier Festival de cinéma trans montréalais, est né. Iris Pintiuta a recruté 10 bénévoles, organisé la projection de 13 films sur quatre jours, suscité l’intérêt de la CBC et… assumé l’ensemble des coûts à l’aide de sa carte de crédit, la seule véritable source de financement à sa portée étant les 2 000 $ du Fonds de développement de la doyenne de la Faculté des arts.

« À un moment donné, je me suis demandé si je ne venais pas de me mettre dans le pétrin, se rappelle Iris, mais l’événement a été un réel succès. Une deuxième édition est prévue en septembre prochain et nous sommes sur la bonne voie pour atteindre la cible de financement de cette année. »

Iris ambitionne maintenant de présenter le Festival ailleurs au pays et d’organiser des ateliers et des activités de mentorat pour les aspirants cinéastes.

« Mon objectif, c’est qu’Exposures devienne le plus important événement du genre d’ici cinq ans », précise-t-iel.

« J’espère que mon parcours inspirera d’autres personnes à explorer de nouvelles voies en lien avec leurs études pour acquérir des compétences utiles – et avoir un emploi à la clé. »

 

En faveur de l’acceptation de l’identité trans

Le succès du festival Exposures représente une victoire pour Iris Pintiuta, mais aussi pour l’ensemble de la communauté transgenre montréalaise. En effet, l’événement vise à promouvoir une représentation inclusive des personnes trans, et à créer des programmes et des activités qui favorisent leur acceptation.

« [Le festival] est un grand projet mené avec amour et qui a une incidence positive évidente sur l’ensemble de la société », explique Alanna Thain, professeure agrégée au Département d’études anglaises et directrice pédagogique d’Iris Pintiuta. « C’est un projet qu’Iris a réalisé avec soin et professionnalisme. »

Avec la montée du sentiment anti-trans, le festival semble « plus important que jamais », confie Iris Pintiuta. « S’il y a quelque chose que j’ai appris de mon expérience, c’est que la communauté trans est extrêmement résiliente et qu’elle va trouver une façon de surmonter les difficultés. »

D’ailleurs, le travail accompli porte déjà ses fruits.

« Réunir 200 personnes et leur donner l’occasion de se voir représentées à l’écran avec sérieux et dans toute leur complexité, c’est génial. J’aime ce que je fais et je veux voir jusqu’où je peux porter ce projet. »

Le cinéma trans vous intéresse? Iris Pintiuta recommande les œuvres des cinéastes canadien(ne)s Kaye Adelaide, Alec Butler, TJ Cuthand, Luis De Filippis et Mirha-Soleil Ross.