
Depuis qu’il a entamé ses études doctorales à l’École des sciences de la communication humaine de l’Université McGill, en 2021, la perspective de Nariman Amantayev sur l’autisme a changé.
Membre du Psychology of Pragmatics (POP) Lab, le doctorant se penche sur les fonctions cérébrales exécutives des adolescents autistes et neurotypiques. S’il apprend de nouvelles choses chaque jour, ce qui l’a le plus surpris, c’est de découvrir qu’il existe beaucoup d’idées fausses au sujet de l’autisme en Russie, où il a obtenu un baccalauréat en travail social, ainsi qu’au Kazakhstan, où il a obtenu sa maîtrise en éducation multilingue.
« Au Canada, les discussions portent sur l’inclusion, les systèmes de soutien et les manières d’améliorer la qualité de vie des personnes autistes, dit Nariman Amantayev. Une grande partie des problèmes auxquels les personnes autistes sont confrontées n’émanent pas de leur autisme, mais plutôt de leur condition dans un monde qui n’est pas adapté à la neurodivergence. »
« Les pays postsoviétiques, quant à eux, n’ont pas évolué en ce sens; la sensibilisation demeure un enjeu important, même au sein des cercles universitaires et médicaux. Certains pensent que l’autisme n’existe pas, tandis que d’autres croient qu’il est causé par les vaccins, les gadgets ou par des facteurs liés à la modernité. Là-bas, l’autisme est compris comme quelque chose qui doit être corrigé », déplore-t-il.
Par conséquent, Nariman Amantayev a pris l’initiative de déboulonner des mythes nocifs, de contester des politiques désuètes et de sensibiliser le public à l’autisme dans sa région natale. Au cours des trois dernières années, il a attiré près de 25 000 abonnés sur Instagram et a figuré dans des publications de renom. Il fait désormais partie d’une initiative visant à créer, au Kazakhstan, une école destinée aux enfants autistes.
« Les idées fausses au sujet de l’autisme portent atteinte à la qualité de vie des personnes autistes, affirme Nariman Amantayev. Je m’engage à briser ces mythes et à mettre mes connaissances à profit pour changer la donne. »
La lutte contre la désinformation
Nariman Amantayev a grandi au Kazakhstan et parle russe, anglais et kazakh. Il s’est inscrit à l’Université McGill pour étudier avec la Pre Aparna Nadig et le Pr Karsten Steinhauer, qui supervisent ses recherches.
« J’ai la chance d’avoir accès à des travaux, à une perspective et à des ressources uniques, ce qui n’est pas le cas pour beaucoup de gens dans ma région natale », dit-il.
Un an après le début de son programme postdoctoral, Nariman Amantayev a commencé à faire part de son expérience universitaire sur Instagram, Threads et Telegram. Il publie en russe et promeut par ailleurs l’inclusivité et le partage de travaux de recherche jugés par des pairs.
« J’ai le privilège d’étudier à l’une des meilleures universités et d’apprendre en compagnie d’experts de premier plan dans mon domaine, se réjouit Nariman Amantayev. Nous sommes des scientifiques; notre but est de faire profiter les gens de nos recherches. »
Nariman Amantayev estime que ses abonnés sont en grande partie des parents d’enfants autistes et des professionnels travaillant avec des personnes neurodivergentes, et la plupart soutiennent ses efforts. Malgré le cyberharcèlement et les attaques dont il a été la cible, il affirme : « Chaque jour, des parents m’écrivent pour me dire à quel point mon travail les aide, et cela me rend vraiment heureux ».
Un changement de paradigme
Les efforts de Nariman Amantayev lui ont valu une place sur la liste 30 Under 30 de Forbes Kazakhstan, ainsi que de participer à des entrevues à la radio et à la télévision. Sa publication présentant sa visite à l’école montréalaise À pas de géant, qui accueille des élèves autistes, a attiré l’attention d’un groupe de parents et les a encouragés à créer une école fondée sur ce modèle, à Ekibastouz, une ville située dans le nord-est du Kazakhstan.
« Ma publication a trouvé écho auprès du public. Les gens me disent qu’une initiative similaire les aiderait grandement, rapporte Nariman Amantayev. J’ai rencontré des représentants municipaux et offert mon aide pour former leur personnel et veiller à ce qu’ils adoptent des pratiques exemplaires. »
« Nariman a amené des idées révolutionnaires au grand public en Asie centrale et dans les pays où l’on parle russe, dit Aparna Nadig, sa superviseure principale au doctorat. Ses travaux continueront d’avoir une incidence importante sur les personnes ayant un trouble du spectre de l’autisme et leur famille. »
Bien qu’il n’ait pas encore décidé ce qu’il fera après son doctorat, Nariman Amantayev aimerait continuer à soutenir les personnes neurodivergentes. Il envisage d’écrire une série de livres consacrés aux professionnels travaillant avec des personnes autistes ainsi qu’aux parents d’enfants autistes, et de les publier dans plusieurs langues, notamment en russe et en kazakh.
« Je souhaite communiquer des données probantes de manière conviviale, souligne-t-il. Le savoir ne pourra jamais créer de véritables changements s’il reste enfermé dans les revues scientifiques. »