De l’étude des technologies propres à la direction d’une jeune entreprise primée

Trois diplômés de l’Université McGill fondent Altiro Energy dans le but de révolutionner le stockage de l’énergie propre
Les fondateurs d’Altiro (de gauche à droite), Nic Pinkerton (B. Ing. 2020 et M. Ing. 2023), Samson Bowen Bronet (B. Ing. 2017 et M. Ing. 2021) et Martin Aralov (B. Ing. 2017 et M. Ing. 2021), ne se sont pas simplement initiés aux technologies propres – ils en ont fait leur gagne-pain. Leur but? Commercialiser une nouvelle technologie développée durant leurs études supérieures.

Trois étudiants de l’Université McGill ne se sont pas simplement initiés aux technologies propres – ils en ont fait leur gagne-pain. Leur but? Commercialiser une nouvelle technologie développée durant leurs études supérieures.

« Le contexte était tout simplement idéal », indique Samson Bowen-Bronet (B. Ing. 2017 et M. Ing. 2021).

Pendant ses études de premier cycle, Samson a suivi deux cours de thermodynamique avec le Pr Jeffrey Bergthorson du Département de génie mécanique. « C’est un très bon professeur, qui sait motiver ses étudiants », soutient l’ancien étudiant. Les cours en question avaient pour thème les systèmes énergétiques sur fond de crise climatique. « Nous étions conscients que ce que nous apprenions allait avoir une incidence réelle sur le monde. »

Samson a par la suite entrepris des études supérieures sous la gouverne du Pr Bergthorson, qui est à la tête du Laboratoire de recherche sur les carburants de remplacement de l’Université McGill. Depuis plus de 10 ans, l’équipe de recherche de ce laboratoire explore le potentiel des métaux comme source d’énergie propre et substitut aux combustibles fossiles. Selon cette équipe, les poudres métalliques, connues pour leur utilisation dans les accélérateurs à poudre, sont des vecteurs énergétiques non polluants et recyclables à l’infini, et peuvent être stockées et transportées à grande échelle.

Samson a rencontré son collègue Martin Aralov (B. Ing. 2017 et M. Ing. 2021) durant sa maîtrise. Ensemble, ils se sont lancés dans la conception d’un prototype fonctionnel utilisant une poudre à base de fer comme accumulateur d’énergie. Unissant leurs connaissances techniques et scientifiques, ils ont contribué chacun à leur façon au processus, confiant au Pr Bergthorson l’examen des choix de conception.

« Le processus s’est déroulé dans la bonne humeur et a été assez fructueux dès le départ », se réjouit Samson. Avec ses collègues, il a inventé le premier système énergétique de combustion de fer épuré faisant intervenir l’air. Comme la combustion et le processus de recyclage n’émettent pas de carbone, le système est décarboné.

« Tout repose sur tes épaules »

Diplôme en poche, Samson et ses collègues ont dû décider de la suite des choses : poursuivre leurs études supérieures ou fonder une entreprise. « La concrétisation d’un projet mené en laboratoire passe obligatoirement par la création d’une entreprise, explique Samson. Tu dois te démener. Tout repose sur tes épaules. »

Samson, Martin et le Pr Bergthorson ont déposé une demande de brevet internationale en septembre 2022, et ont officiellement fondé Altiro Energy en décembre 2022. Leur objectif est de révolutionner le stockage de l’énergie propre, comme en fait foi leur site Web. Le nom de leur entreprise, Altiro, est formé de la contraction des mots anglais alternative (solution de rechange) et iron (fer).

Nic Pinkerton (B. Ing. 2020 et M. Ing. 2023) s’est joint au trio à titre de directeur de l’exploitation, tandis que Martin et Samson sont respectivement directeur de la technologie et directeur général. Quant au Pr Bergthorson, il est conseiller scientifique principal de la jeune pousse. Samson s’empresse toutefois de préciser que les rôles ne sont pas figés. « La majorité de nos décisions sont prises par consensus. »

La technologie circulaire d’Altiro, alimentée par un combustible à base de fer, offre une solution énergétique propre et sécuritaire, à un coût qu’on peut imaginer concurrentiel. Elle se caractérise aussi par sa densité énergétique (pour se substituer aux combustibles fossiles, toute solution de rechange viable doit avoir une densité énergétique élevée pour faciliter le commerce et le stockage). Durant son passage à l’Université McGill, l’équipe a travaillé avec Hydro-Québec et trois producteurs de poudre de fer, soit Tata Steel, Hoeganaes Corporation et Rio Tinto.

L’équipe d’Altiro a été la favorite des juges lors de la première édition de Tech Shuk, tenue à Montréal en avril 2022, puis lauréate du concours d’écotechnologie organisé par le Fonds d’innovation de l’Université McGill en janvier 2023. Altiro figurait aussi parmi les 15 entreprises sélectionnées qui se sont jointes à la cohorte de l’hiver 2023 du programme Propulsion du Centech. Organisme à but non lucratif, le Centech soutient des entreprises et des projets de haute technologie en offrant des bourses, du mentorat, des ateliers, des espaces de bureaux et des occasions de réseautage.

En mai 2023, Altiro a mis la main sur le Prix du public remis dans le cadre du Festival des solutions climatiques de Montréal. « Nous voulons être un acteur de changement, redéfinir le système énergétique et agir contre la crise climatique », souligne Samson.

Une solution de stockage d’énergie à grande échelle

Selon l’équipe de recherche du laboratoire, les poudres métalliques, connues pour leur utilisation dans les accélérateurs à poudre, sont des vecteurs énergétiques non polluants et recyclables à l’infini, et peuvent être stockées et transportées à grande échelle.

La technologie d’Altiro a été pensée à des fins de stockage d’énergie à grande échelle. L’équipe a dans sa mire les systèmes capables d’alimenter simultanément des milliers de foyers. Elle cherche donc à approcher les grandes entreprises de services, les compagnies d’électricité privées et les industriels.

« Nous avons atteint le niveau de maturité technologique 4, indique Samson, et visons le niveau 6 ou 7, ce qui nécessitera du financement, de toute évidence. » (Samson fait ici référence à l’échelle utilisée par le gouvernement fédéral pour évaluer le stade de développement d’une technologie. Le niveau 1 s’applique aux technologies qui commencent à peine à faire l’objet d’activités de recherche et développement appliqués, alors que le niveau 9 désigne les technologies déjà mises à profit en situation réelle.)

Samson précise que les entreprises sont généralement à la recherche de technologies plus matures, qui peuvent immédiatement être implantées à grande échelle. Il passe donc ses journées à préparer des présentations, à aligner des chiffres et à rencontrer des investisseurs en capital de risque et d’éventuels partenaires.

La technologie d’Altiro se démarque principalement par sa fiabilité de stockage à long terme, une qualité essentielle, surtout lorsqu’il est question d’énergie solaire ou éolienne. En effet, cette énergie est perdue si un système n’est pas en mesure de la stocker pendant des heures, des jours, voire des semaines, lorsque le soleil et le vent se font rares ou, au contraire, trop intenses.

« Si les gens sont vraiment prêts à abandonner l’huile, le gaz naturel et le charbon, nous aurons besoin de stockage à grande échelle, au-delà de la capacité actuelle des batteries », soutient Samson. Compte tenu de leur densité énergétique, c’est-à-dire de la quantité d’énergie stockée par unité de masse ou de volume, les métaux pourraient surpasser de très loin les batteries et se révéler plusieurs fois supérieurs aux systèmes de stockage d’hydrogène.

Optimisé, plus écologique, plus économique — la triade inaccessible

Actuellement, le coût est ce qui refroidit le plus les clients potentiels.

« Tout ce qui est vraiment respectueux de l’environnement est synonyme de valeur ajoutée », assure Samson, qui remarque toutefois que le secteur privé demeure peu enclin à passer à une technologie verte si celle-ci est plus coûteuse. « Un produit optimisé, plus écologique et plus économique trouvera assurément preneur, mais il est rare qu’un même produit réunisse toutes ces qualités. »

Les réseaux énergétiques misent de plus en plus sur des ressources renouvelables, dont le prix continue de chuter sous l’effet d’économies d’échelle. Altiro entend toutefois se positionner au cours des prochaines années comme un joueur de premier plan, capable de défier la concurrence au chapitre des coûts.

Pour le moment, Samson s’emploie à convaincre de possibles clients, partenaires et investisseurs qu’Altiro est la solution aux problèmes imminents.

« La solution ne s’impose pas d’elle-même »

Le plus difficile pour les membres de l’équipe a été d’expliquer leur travail à des profanes, dont des investisseurs en capital de risque, des politiciens et des décideurs politiques, alors qu’ils ont l’habitude d’échanger avec des collègues de laboratoire ou des scientifiques. « Je pense que nous parvenons beaucoup mieux maintenant à expliciter notre solution », indique Samson.

Samson sait que ses études à l’Université McGill l’ont préparé à cette nouvelle aventure. « Ça en valait assurément le coup », selon ses dires. Il constate qu’étudier aux cycles supérieurs s’apparente étroitement à diriger sa propre entreprise : il faut gérer son temps, fixer ses propres échéanciers et se motiver.

« Dans le monde de l’innovation, la solution ne s’impose pas d’elle-même. »

***

Complément d’information sur le Pr Jeffrey Bergthorson et le Laboratoire de recherche sur les carburants de remplacement : « The defining challenge of our time » | Channels – McGill University

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