
En écumant les berges montréalaises pour recueillir des échantillons de poissons, Anthony Gagliano, étudiant à la maîtrise en sciences à l’Université McGill, a été frappé par la quantité de déchets plastiques jonchant les rivages.
« Des masques aux bouteilles en passant par la styromousse, il y avait des déchets partout, se remémore-t-il. J’ai fait ce que j’ai pu pour nettoyer les lieux, puis j’ai transposé cet effort dans la vie de tous les jours. »
Cette adhésion au développement durable, Anthony l’a transportée dans le Laboratoire de génomique des populations de poissons et de la conservation, où lui et la doctorante Marie Launay ont réduit de près de 50 % les déchets plastiques générés par les activités de laboratoire.
Dirigé par Denis Roy, professeur adjoint au Département des sciences des ressources naturelles, le laboratoire fait partie de la Faculté des sciences de l’agriculture et de l’environnement. Avec l’aide du Pr Roy, les deux étudiants ont mis en place d’autres pratiques écoresponsables qui pourraient servir de modèles pour d’autres laboratoires. Leur travail a d’ailleurs récemment fait l’objet d’un article sous la rubrique Spotlight on Green Labs (Pleins feux sur les laboratoires verts) de la revue Nature.
En outre, l’équipe a obtenu récemment la certification laboratoire durable, niveau or, du Bureau du développement durable de McGill, distinction décernée à cinq autres laboratoires mcgillois seulement.
Le type de solution qu’il faut dans les labos
Lorsque Marie Launay et Anthony Gagliano ont commencé à mesurer la quantité de déchets plastiques générés par leurs travaux, le résultat n’a pas manqué de les étonner : la création d’une bibliothèque génétique à partir de l’ADN extrait de 96 échantillons de poisson avait produit 7,77 kg de déchets. Comme ils comptaient analyser 518 échantillons en tout, ils se sont rendu compte que s’ils ne faisaient rien pour les réduire, cette seule activité de laboratoire produirait 41 kg de déchets plastiques.
Parmi les principaux changements mis en place, citons l’adoption de pointes de pipette non remplies, dont l’emballage contient deux fois moins de plastique que les versions préremplies. En prime, le laboratoire a économisé, puisque les pointes non remplies étaient moins onéreuses. Et ce n’est pas tout : l’équipe a découvert que les boîtes de pointes de pipettes pouvaient être décontaminées à l’autoclave, ce qui permettait de les réutiliser de nombreuses fois et de réduire encore davantage les déchets.
Elle a également mis au point un protocole de réutilisation des tubes de fragmentation de l’ADN, généralement à usage unique, permettant de garantir le maintien de l’intégrité tout en réduisant considérablement la quantité de plastique jetable.
Par ailleurs, le nettoyage régulier des berges fait aujourd’hui partie intégrante du travail des deux étudiants. Ainsi, désireux d’adopter des comportements écoresponsables dans leur laboratoire comme sur le terrain, le duo a lancé des opérations de nettoyage sur ses sites d’échantillonnage de poissons partout au Québec.
Dans l’espoir d’obtenir une certification or, l’équipe a également exploré de nouvelles avenues, telles que l’achat d’un nettoyeur automatique de pointes de pipettes qui lui permettra de nettoyer et de réutiliser ces pointes jusqu’à 25 fois avant de les jeter. Financée dans le cadre du projet « Solutions à grande échelle pour la diminution des déchets de laboratoire » du Fonds des projets durables, cette technologie de pointe devrait être disponible d’ici juin 2025. Enfin, l’équipe a, entre autres initiatives, amélioré l’efficience de l’éclairage et entrepris le nettoyage du congélateur.
« L’initiative de Marie et d’Anthony a d’énormes retombées, déclare François Miller, directeur général du Bureau du développement durable. Il est évident pour toute personne travaillant en laboratoire ou sur le terrain que la recherche scientifique a une empreinte environnementale disproportionnée. Leurs protocoles visant à réduire au minimum les déchets plastiques dans la recherche de haut niveau, c’est le type de solution dont les laboratoires ont besoin et de mesure à prendre pour atteindre l’objectif zéro déchet de McGill. »
Marie Launay lui est, quant à elle, fort reconnaissante.
« Le Bureau du développement durable de McGill offre de nombreux conseils, ce qui est particulièrement utile pour les laboratoires qui ne savent pas du tout par où commencer en matière de développement durable », souligne-t-elle.
Pour savoir comment trier et recycler les articles de laboratoire, consultez les nouveaux guides de l’Université sur les déchets de laboratoire.