
Le verre biodégradable peut-il remplacer le verre véritable? Une nanocapsule antiparasitaire pourrait-elle cibler les chenilles sans nuire aux abeilles? Et si la solution à la corrosion des turbines en mer était une pellicule d’alliage d’un micron d’épaisseur?
Ce ne sont là que quelques-unes des questions auxquelles s’est attaquée la cohorte 2024-2025 des boursiers et boursières de l’Initiative systémique de McGill sur la durabilité (MSSI), qui a présenté ses travaux dans la salle de bal de la Maison Thomson à la fin d’avril.
La présentation est l’aboutissement d’un programme de bourses de neuf mois géré par la MSSI, unité de recherche interfacultaire qui, jour après jour, innove dans la conduite de la recherche universitaire en développement durable.
« Cette bourse s’écarte quelque peu de la norme, explique Evan Henry, directeur associé de la MSSI. Elle permet aux personnes étudiantes d’explorer des projets qui transcendent les disciplines; des idées qui, autrement, n’obtiendraient peut-être pas de financement ou de soutien, mais qui pourraient déboucher sur quelque chose de transformateur ».
Cinq équipes étudiantes ont présenté leurs travaux sur des sujets allant de la dégradation des pellicules minces dans des environnements extrêmes à l’espace dans les rues montréalaises, où les voitures occupent une place disproportionnée au détriment des cyclistes et des piétons. La bourse s’est avérée fructueuse : tous les titulaires ont soumis le fruit de leurs travaux à une revue ou à une conférence évaluée par les pairs.
Une équipe composée de chercheurs en chimie et en génie a mis au point une méthode permettant d’étudier les effets combinés de la corrosion et de l’usure sur des revêtements métalliques ultraminces – savoir indispensable pour l’amélioration des matériaux utilisés dans le domaine de l’énergie propre. Une autre a créé un insecticide ciblé qui ne s’active que dans les milieux digestifs alcalins : ainsi, il tue les chenilles destructrices, mais épargne les pollinisateurs.
Développement durable : un modèle de recherche repensé
Depuis sa création en 2017, la MSSI a consacré plus de six millions de dollars à la recherche sur le développement durable à McGill, contribué au lancement de quatre jeunes pousses et épaulé plus de 250 chercheurs et chercheuses. Le programme de bourses, qui en est à sa deuxième année, est une expérience pratique d’innovation interdisciplinaire. La plupart des boursiers et boursières sont sortis du thème principal de leur thèse, ont utilisé des méthodes qui leur étaient souvent peu familières et ont collaboré avec différentes facultés.
« Nous avons beaucoup appris les uns des autres, constate Lin Wu, candidat au doctorat en génie minier et des matériaux. Mais c’était aussi un défi logistique : des protocoles de laboratoire différents, des problèmes d’accès au matériel… il a fallu du temps pour résoudre les problèmes, même des choses élémentaires comme la compatibilité des échantillons. »
Mais c’est là, précisément, le genre de frictions que la MSSI cherche à créer.
« Nous ne sommes pas un département. Nous sommes un système qui relie les chercheurs et chercheuses de neuf facultés. Notre objectif est de repenser le rôle du milieu universitaire comme catalyseur des transitions en matière de développement durable – non seulement par la recherche, mais aussi par le mode de réalisation de cette recherche », explique Evan Henry.
Cette façon de voir les choses a trouvé un écho auprès de Diane Dechief, directrice du programme conjoint de baccalauréat en arts et en sciences de l’Université McGill, qui a animé un atelier de communication scientifique pour les boursiers et boursières à l’automne 2024 et a assisté à la présentation.
« Les innovations créatives et durables nées de la collaboration interdisciplinaire aux cycles supérieurs m’ont beaucoup impressionnée, lance-t-elle. Les boursiers et boursières de la MSSI font vraiment un travail formidable. »
En outre, fait-elle observer, cette présentation des titulaires de bourse témoigne de la force de la collaboration entre des étudiants et étudiantes aux cycles supérieurs qui conjuguent leurs compétences pour œuvrer au développement durable. Elle a fait un parallèle avec le baccalauréat en arts et sciences, constatant qu’il préparait, lui aussi, les étudiants et étudiantes à la collaboration interdisciplinaire.
Par ailleurs, cette expérience de recherche au sein de la MSSI guide les efforts de collaboration interdisciplinaire déployés plus largement à l’Université.
« J’ai eu la chance d’animer un atelier pour les boursiers et boursières de la MSSI l’automne dernier; nous avons parlé des difficultés du travail d’équipe interdisciplinaire, mais aussi des possibilités qu’il offrait, souligne Sarah Heiberg, conseillère principale en gestion du changement pour le projet Nouveau Vic de McGill. La collaboration entre les disciplines au sein de la MSSI peut nous éclairer grandement pour la planification de nouveaux lieux et de nouvelles structures de recherche interdisciplinaire et transdisciplinaire. »